Vers 4h00 je me réveille en sursaut. Dans un peu moins d’une heure le Soleil doit se lever pour le Solstice. Il faut quitter la voiture et redescendre vers Stonehenge. Je réveille Laurent, qui a visiblement mal dormi. Je vois bien qu’il est dans le gaz, et il me semble qu’il met un peu de temps à réaliser où il est. Dans les premières lueurs de l’aube, nous descendons la pente qui conduit au cercle de pierres. En chemin nous constatons que l’horizon s’est en partie embrumé, en particulier à l’Est. Le ciel est bien dégagé au zénith, et il semble que seul l’endroit où le Soleil doit apparaitre ne soit obscurci.
Lorsque nous arrivons aux pierres, Laurent me dit qu’il n’a pas son portefeuille sur lui. Il doute de l’avoir laissé dans la voiture, et craint qu’il soit tombé de sa poche. Il retourne donc sur le parking. Le trajet aller est somme toute assez long, et cet allez retour dure bien une demi-heure. Pendant ce temps là, je me paye un café, puis j’observe les gens qui continuent à faire la fête au cœur du cercle de mégalithes. Finalement je me poste à l’entrée du cercle en face de la pierre du talon qui marque l’axe dans lequel au Solstice, le Soleil doit se lever. Laurent finit par me rejoindre à 4h45 après un long aller-retour jusqu’à la voiture. Bonne nouvelle, son portefeuille était bien dans la voiture. Et surtout, le Soleil n’est pas encore levé. Il n’est pas arrivé trop tard pour assister au spectacle. Le rideau nuageux à l’Est commence à se teinter d’orange, et soudain vers 5h00, le Soleil apparait dans une grande clameur. Il m’est enfin donné de voir ce à quoi je n’avais pas pu assister en 2011, ce moment du lever de Soleil sur l’axe magique des pierres de Stonehenge. Ce que les Hommes du néolithique observaient déjà, il y a environ 5 000 ans.
La foule tournée vers le Soleil, crie, chante, et applaudit, alors que le site se teinte de couleur orange, et que le fin rideau nuageux à l’horizon, se déchire. De l’autre côté, à l’Ouest, la pleine Lune n’est pas encore couchée. Progressivement la lumière s’intensifie, et la coloration orangée du Soleil se sature. Le mélange avec la couleur gris vert des pierres de Stonehenge est du plus bel effet. Dans le cercle, la fête se poursuit, percussions, cornes, danses, et une femme, déjà présente en 2011, énonce des revendications d’accès au lieu avec un mégaphone. Un gars se déchausse, lance ses chaussettes dans la foule et part pieds nus dans l’herbe. Tout le monde semble à la fois épuisé, et excité, ce mélange semble conduire une bonne part du public à jetter ses dernière forces dans un état de transe.
Lorsqu’il est enfin temps de partir, les nuages commencent progressivement à emplir le ciel, et le Soleil commence à disparaitre. De retour à la voiture, sur le parking qui s’est largement vidé, nous consultons à nouveau la météo. La prochaine nuit, nous la passerons dans la queue, et nous espérons éviter la pluie. Les informations que nous trouvons sur divers sites météo sont contradictoires. Certains indiquent un peu de pluie sur Pilton, d’autres pas du tout, nous restons donc assez confiants.
Nous quittons Stonehenge, direction Glastonbury, la ville, où nous voulons aller prendre le petit déjeuner. Nous prenons la fameuse A303, la route de Glastonbury. Peu avant d’atteindre l’embranchement de la A37 qui conduit vers le site du festival, nous nous arrêtons dans une station service. Là je bois un café, et j’accomplis un rituel auquel je ne peux résister chaque année; je photographie les dernières toilettes auxquelles j’aurais accès avant le festival.
Sous la pluie, nous repartons toujours en direction de la ville de Glastonbury, en passant par la A37, Canard’s Grave, et la A361 via Pilton, c’est à dire en longeant le site du festival par l’Ouest et le Nord. Sur Worthy FM, que nous captons enfin, on entend Under the Milky Way de The Church, que j’ai ratés l’année dernière. Sur le bord de la route quantité de panneaux de signalisation temporaire indiquent que nous approchons du festival. En chemin je montre à Laurent les diverses entrées, mais aussi les divers points de vue que l’on peut avoir du site depuis la route. Avant d’arriver à Pilton, il peut enfin visualiser la colline de Pennard qu’il n’a, pour l’instant, vu qu’en photo, ou sur la webcam de la BBC. Il peut aussi mesurer concrétement la taille du site. Le festival de Glastonbury prend toute sa dimension et devient enfin très concret. Sur la A361, peu après avoir passé la dernière porte, nous voyons apparaitre le Tor, signe que nous approchons de Glastonbury. Nous y arrivons quelques minutes plus tard. Il est environ 10h00 lorsque nous nous garons sur le parking de l’abbaye.
Un petit marché est installé sur le trottoir de la rue principale. Là nous découvrons des étals de nourriture bio, pierres, cristaux, et autres objets magiques. Glastonbury reste la ville New-Age que j’avais découvert un peu par hasard 30 ans plus tôt. Si le ciel reste menaçant, la pluie s’est arrêtée. Sur le même trottoir nous nous installons en terrasse d’un petit café où nous décidons de prendre notre petit déjeuner. Mais l’opération va durer largement plus d’une heure. Dans un premier temps, nous voyons tous les employés sortir du café précipitamment. Puis arrivent les pompiers qui installent un gros ventilateur devant la porte du café. Là on nous explique qu’un détecteur a provoqué une alerte au gaz dans le café, et qu’il faudra un peu patienter pour le petit-déjeuner. L’évacuation des gaz dure près d’une demi-heure, pendant laquelle une petite bruine apparait et disparait aussi soudainement qu’elle était venue. Puis, la serveuse revient nous demander de lui rappeler quelle était notre commande, qu’elle met un temps fou à préparer. Entre temps le patron répare son alarme incendie, qu’il teste à plusieurs reprises, causant un bruit insoutenable. Après la longue journée de la veille, et une courte nuit dans la voiture, cet épisode est un peu une épreuve. Surtout que nous nous étions installés là, espérant nous reposer, en prévision des 20h00 éprouvantes à venir.
Dès notre petit déjeuner pris, nous nous précipitons vers le parking de l’Abbaye d’où la navette qui monte au Tor doit partir. Nous la prenons juste à temps, et en quelques minutes, cette dernière nous dépose à l’entrée d’un champ au pied de la colline. En montant nous croisons un couple d’allemands qui cherchent un iPhone qui, parait-il, aurait glissé le long de la pente, perdu par quelqu’un un peu plus haut. Le téléphone devrait se trouver dans un fourré qui se trouve au bord du chemin par lequel nous montons au sommet du Tor. Nous cherchons en vain quelques instants, et reprenons les escaliers vers la cime, et la tour St Michel. Au sommet,l fait assez froid, et surtout venteux. De là nous observons les nuages qui ont complétement rempli le ciel, et nulle part ils ne semblent vouloir se dégager. C’est assez inquiétant pour la nuit à venir… Nous observons aussi le panorama, et en particulier la vue que nous avons sur le site du festival. De loin, on visualise les tentes colorés, et surtout la Pyramide. Bientôt nous serons là bas.
Photo: Asyd